La recrudescence avérée des
actes et des propos antisémites, les polémiques récurrentes autour
de ces problèmes, ont amené plusieurs personnes dans notre Église
à souhaiter s’emparer de la difficile question de l’antisémitisme.
Les groupes de quartier de Saint-Égrève et des Grands Boulevards
ont ainsi consacré chacun une soirée, respectivement le 9 et le 29
mai, à la réflexion et à la discussion à propos de ce thème, en
s’aidant du dernier livre du rabbin Delphine Horvilleur, intitulé
Réflexions sur la question antisémite. L’auteure s’y efforce
de dévoiler les motifs profonds, inconscients, de la haine des
juifs, des motifs qui permettraient de rendre raison de sa
persistance au fil des siècles et dans des contextes variés. Et
elle le fait à partir d’une approche singulière, qui convoque les
textes bibliques et les lectures qu’en ont proposé les rabbins afin
de mieux comprendre ceux qui les persécutaient. De là, elle arrive
à la conclusion que cette haine du juif traduirait d’abord une haine
de soi, de ce qui en soi-même menace une identité stable et solide.
C’est ce doute sur soi-même, cette faille qui habite tout homme, que
le juif viendrait rappeler et incarner, de manière insupportable
pour l’antisémite.
Sans doute n’est-ce pas là le dernier mot sur l’antisémitisme,
et la discussion a bien fait apparaître que le contexte politique
actuel ne doit pas non plus être négligé. Une fois établi ce
diagnostic, se posait la question de savoir comment lutter contre ce
fléau. L’éducation a été mise en avant, de même qu’une
meilleure connaissance mutuelle. Ce qui suppose de chaque côté un
effort renouvelé pour nourrir le dialogue. En tant que chrétiens,
et chrétiens protestants, héritiers d’une histoire autant
douloureuse que riche de promesses et de possibles rapprochements,
nous sommes tout particulièrement convoqués à ce dialogue. Enfin,
demeurait la question de savoir s’il y a une spécificité de
l’antisémitisme au regard d’autres formes de racismes, ou si ce
sont plus largement la peur de l’autre et le rejet de la différence
qui doivent être considérés. Cela laisse le champ ouvert pour
d’autres rencontres à venir.
Sébastien Gengembre
Stagiaire pasteur